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Pays où l’extrême droite n’est pas représentée au Parlement
Pays où l’extrême droite est représentée au Parlement mais n’est pas au pouvoir
Pays où l’extrême droite est au pouvoir dans un gouvernement de coalition
Pays où l’extrême droite est au pouvoir
Pays non repris dans cet état des lieux

Mieux connaître l’extrême droite pour mieux la combattre

La montée et le succès des partis d’extrême droite sont des phénomènes inquiétants, qu’il est urgent de combattre. C’est dans cette optique que le Centre d’Action Laïque a imaginé ce site web, dont l’objectif est de proposer un état des lieux de l’extrême droite en Europe.

Plus jamais ça!

Combattre l’extrême droite et résister aux dangers et à la propagation des idées liberticides passe par le travail de Mémoire, pour éviter de reproduire les erreurs commises dans le passé, pour comprendre et décoder le monde qui nous entoure. C’est l’objectif des Territoires de la Mémoire.

Découvrez comment agir

État des lieux de l'extrême droite en Europe

Évaluer la santé de nos démocraties sous le prisme de l’extrême droite est un exercice indispensable, mais complexe. De nombreux mouvements, organes ou partis politiques en Europe empruntent en effet à l’extrême droite certains ingrédients leur assurant un succès électoral sans pour autant s’inspirer de l’ensemble du corpus idéologique et doctrinal de l’extrême droite. Comme le précise le politologue Benjamin Biard1, « l’extrême droite est protéiforme et peut être néo-nazie, nationale-populiste, eurosceptique, intégriste (d’un point de vue religieux), ou reposer sur un projet relevant du ‘gramscisme de droite’ (selon lequel la politique ne se fait pas que dans les lieux traditionnels du pouvoir mais aussi à travers un travail idéologique au sein de la société civile) ».

Inégalité, nationalisme, radicalisme : les trois caractéristiques des projets politiques d’extrême droite

Trois éléments récurrents – qui ne vont pas l’un sans l’autre dans les mouvements et partis d’extrême droite – sont régulièrement repris par différents chercheurs2: inégalité, nationalisme, radicalisme.

Inégalité. L’élément principal est la croyance en l’inégalité entre les peuples, les cultures, les civilisations, les races et les individus. Pour l’extrême droite, cela va au-delà du constat évident que des inégalités existeront toujours : le fait qu’il y ait des gens supérieurs et inférieurs est une valeur forte et est considéré comme une bonne chose. Si l’on creuse le discours de ces personnes, même si elles essayent de dissimuler ce qu’elles pensent, cela finit par ressortir : ces inégalités sont souvent considérées comme immuables. Dans cette conception du monde, un homme n’est pas et ne doit pas être égal à une femme, une personne handicapée n’est pas égale à une personne bien portante, et certains de ces individus sont supérieurs aux autres. Cette hostilité vis-à-vis de l’égalité débouche sur des phénomènes banalisés de discriminations et d’exclusions.

Nationalisme. Le deuxième élément est l’attachement à la Nation, qui est un rempart contre l’ennemi extérieur. Pour l’extrême droite, cela va au-delà des besoins d’identité. Que ce soit par peur de l’autre (culture, nation, peuple…) ou par sentiment de supériorité, la meilleure des nations, des personnes, ou des cultures, celle qui mérite d’être protégée ou développée, est alors évidemment… la sienne. Ainsi pour la protéger, elle n’hésite pas à restreindre les libertés fondamentales de celles ou ceux qu’elle considère comme ses ennemis.

Radicalisme. Troisième et dernier point, le radicalisme : l’extrême droite considère qu’il faut agir de manière radicale et donc mettre en œuvre tout ce qu’il est possible de mettre en œuvre pour régler tel problème qu’elle identifierait. Le radicalisme est un procédé ou une conduite extrême pour donner corps à un projet spécifique. Il génère des relations clivantes qui rendent difficile à la fois l’existence d’autres opinions, et la tenue de débats et de dialogues sereins et productifs. La certitude de la conviction radicale débouche sur une forme de déshumanisation de l’autre : ce dernier ne représente alors plus qu’un système à abattre, envers qui l’extrême droite manifeste sa haine. La dignité de l’autre, en tant qu’être humain, est de facto niée.

En résumé: l’extrême droite se sent radicalement convaincue de ses idées et de la (sa) supériorité (de son idéologie, de sa culture, de sa Nation, de son sexe, de sa personne…).

L’évaluation du niveau liberticide d’un discours politique

Il y a donc dans les discours et projets politiques d’extrême droite trois principaux indices qui permettent de les identifier comme liberticides (privatifs de libertés fondamentales et allant à l’encontre des droits humains). Ils relèvent du fond (inégalité, Nation) et de la forme (radicalisme).

Sur une « échelle du risque liberticide », où chacun des trois éléments pris isolément constitue déjà une atteinte aux valeurs démocratiques, l’extrême droite a ceci de caractéristique qu’elle les combine tous les trois. Cela place l’extrême droite au sommet du risque liberticide en regard de tout autre projet politique connu à ce jour. La question de savoir si elle est intrinsèquement plus dangereuse qu’un projet politique qui s’appuierait, par exemple, sur une seule de ces caractéristiques est intéressante à poser : quid d’un pouvoir basé sur la seule inégalité entre les groupes d’individus (état ségrégationniste), sur un nationalisme fort (état nationaliste), ou sur une vision radicale (état dictatorial ou totalitaire) ?

Les projets aux valeurs liberticides, en particulier ceux d’extrême droite puisqu’ils les combinent toutes, sont d’ailleurs contraints de lisser de plus en plus leurs discours pour sortir du champ des lois qui condamnent l’incitation à la haine, à la violence, à la discrimination.

La tentation des projets politiques d’extrême droite

L’extrême droite est d’autant plus dangereuse qu’elle est séduisante pour nous toutes et tous, citoyennes et citoyens. Parce qu’elle répond simplement à des problématiques qu’elle identifie, qu’elle résout de manière simpliste et radicale, guidée par les caractéristiques précitées (inégalité, Nation, radicalisme). Ce qui se traduit concrètement par:

  • le rejet de l’immigration, de l’intégration européenne et de la société multiculturelle, allant jusqu’à la xénophobie;
  • la défense et les références à des valeurs traditionnelles – le plus souvent chrétiennes;
  • une priorité programmatique consacrée à la sécurité intérieure, souvent en lien avec une dérive autoritariste;
  • une critique antisystème, anti-establishment et anti-élites.

 

Sur le plan politique, on distingue principalement trois modes d’existence au sein des pays de l’Union européenne:

  • Une extrême droite qui participe à l’exercice du pouvoir exécutif et national, soit en faisant partie intégrante du gouvernement comme en Hongrie ou en Pologne, soit en soutenant un gouvernement minoritaire dont elle ne fait pas partie, comme ce fut plusieurs fois le cas au Danemark. La plupart de ces formations, généralement eurosceptiques et/ou nationalistes-populistes, se sont engagées dans une entreprise de normalisation qui consiste à les dédiaboliser en changeant l’aspect cosmétique tout en préservant le plus souvent leur ADN programmatique.
  • Une extrême droite considérablement développée qui participe activement à la vie politique, notamment depuis les bancs du Parlement, mais qui n’est pas encore parvenue à exercer formellement le pouvoir exécutif, soit par manque d’opportunité politique soit par rejet et blocage d’un front démocratique, comme c’est le cas en Belgique.
  • Une extrême droite inexistante ou insignifiante dans le paysage politique, comme c’est le cas en Lituanie, en Irlande ou au Royaume-Uni.

Nationalisme et extrême droite dans les pays des Balkans

Nos recherches dans les pays des Balkans se heurtent à notre volonté de donner une info complète, lisible, fiable mais vulgarisée. Ainsi, dans la plupart des pays des Balkans occidentaux, différentes formations libérales voire conservatrices tiennent pourtant un discours nationaliste, voire populiste, sans toutefois s’articuler autour d’une conduite extrême ou radicale. La frontière est donc parfois ténue entre des formations populistes ou conservatrices de droite et l’extrême droite. Néanmoins, le processus d’accession à l’indépendance des États de l’ex-Yougoslavie nous invite à estimer un certain nationalisme comme une revendication en lien avant tout avec la construction de leur nation, et non comme un caractère lié essentiellement à l’extrême droite.

L'extrême droite au Parlement européen

La plupart des partis d’extrême droite des pays de l’UE tentent de coordonner leur action dans des regroupements à l’échelle européenne. Ceux qui sont représentés au Parlement européen ont ainsi formé des groupes politiques.

L’extrême droite est une famille politique très diverse, qui a souvent eu beaucoup de difficultés à s’unir. Les divergences idéologiques, les luttes de personnes et leur nationalisme revendiqué sont des obstacles à une action effective au niveau européen. En outre, le plus souvent violemment eurosceptiques, les partis d’extrême droite ne participent que rarement à l’activité parlementaire européenne de manière constructive.

Néanmoins, deux groupes politiques identifiés rassemblent des partis d’extrême droite.

  1. Le groupe Identité et Démocratie (ID), exclusivement composé de partis classés à l’extrême droite: le Vlaams Belang (Belgique), Liberté et Démocratie Directe (Tchéquie), Dansk Folkeparti (Danemark), Alternative Für Deutschland (Allemagne), EKRE (Estonie), le Rassemblement national (France), Lega (Italie), Partij voor de Vrijheid (Pays-Bas), FPÖ (Autriche) et les « Vrais Finlandais » (PS) (Finlande).
    Quatrième groupe au Parlement européen, il compte 75 députés sur 705, issus de 10 pays. Ses priorités déclarées sont de « créer de l’emploi et de la croissance, d’accroître la sécurité, de lutter contre l’immigration illégale et de rendre l’Union européenne moins bureaucratique ».
  2. Le groupe Conservateurs et Réformistes européens (ECR), composé de partis classés à l’extrême droite et d’autres non considérés comme tels, dominé par le PiS polonais. Parmi ses 62 députés issus de 15 pays, 49 représentent des partis d’extrême droite de 8 pays européens: VMRO (Bulgarie), Solution grecque (Grèce), Vox (Espagne), Fratelli d’Italia (Italie), Alliance nationale (Lettonie), Forum voor Democratie (Pays-Bas), Droit et Justice (Pologne), SD (Suède). Ce groupe insiste sur le « respect de la souveraineté des États membres » ainsi que la « défense des frontières ».

La Fidesz, parti au pouvoir en Hongrie, bien que d’extrême droite faisait partie du groupe de centre-droit Parti populaire européen (PPE). En mars 2019, la Fidesz, qui compte 12 députés européens, a été suspendue du PPE à l’initiative de divers partis de ce groupe. Le 18 mars 2021, le parti de Viktor Orban a décidé de quitter le groupe PPE au Parlement européen, sans adhérer à un autre groupe politique pour l’instant.

Des tentatives d’union des extrêmes-droite ont lieu à l’initiative de Viktor Orban, qui cherche à créer un groupe unique au Parlement européen. Le 1er avril 2021, il a réuni à Budapest le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki (Droit et Justice, membre du groupe ECR) et Matteo Salvini, chef de la Ligue (groupe Identité et Démocratie).

Le 2 juillet 2021, une déclaration commune « sur l’avenir de l’Europe » est signée par seize partis d’extrême-droite, notamment le Fidesz, le Rassemblement national, la Ligue, Droit et Justice, Vox, Fratelli d’Italia, le FPÖ, le Vlaams Belang (membres des groupes ECR et ID, tandis que le Fidesz reste non-inscrit). Ils y contestent la primauté des valeurs de l’Union et cherchent à saper la capacité de l’Union à les défendre. Cette déclaration est une étape dans l’alliance des diverses tendances de l’extrême-droite européenne, mais sa portée demeure limitée. Plusieurs partis n’y participent pas (comme l’Alternative pour l’Allemagne et les Démocrates de Suède), les signataires n’ont pas créé de groupe commun au Parlement européen, et leurs divergences restent fortes.

Un sommet réunissant treize partis a eu lieu le 4 décembre 2021 à Varsovie, à l’initiative de « Droit et Justice », au pouvoir en Pologne. Cette réunion n’a pas eu le succès escompté: les divergences restent fortes, et la création d’un grand groupe politique d’extrême droite reste une perspective éloignée. Étaient présents à Varsovie, entre autres, le Rassemblement national, la Lega (mais pas son chef, Matteo Salvini, qui n’a pas fait le voyage), la Fidesz, Vox, le Vlaams Belang… L’AfD, considérée comme « trop radicale » depuis la victoire de l’aile nationaliste sur la tendance eurosceptique plus modérée, n’a pas été invitée. La déclaration finale de la rencontre de Varsovie ne contient rien de neuf, et se limite à une attaque frontale contre les institutions européennes et une vague promesse de collaboration entre membres des groupes ECR et ID.

En avril 2023, le Parti des Finlandais (ex-« Vrais Finlandais », ED), quitte le groupe ID (où siège le RN, le Vlaams Belang, AfD, la Lega, notamment) pour rejoindre l’ECR (groupe ultra-conservateur, où siègent entre autres le PiS, Fratelli d’Italia et les Démocrates de Suède), à cause de divergences sur la politique à adopter face à la Russie. Ce développement marque un affaiblissement du groupe d’extrême droite pro-russe, au profit du groupe de droite ultra-conservatrice, qui défend une politique pro-OTAN.

La question de la politique à adopter envers le régime de Vladimir Poutine divise profondément la droite de la droite en Europe. C’est une des causes de l’échec de la visite en Italie de Jordan Bardella, président du Rassemblement National, au mois d’avril 2023. Il n’a pas pu y rencontrer Giorgia Meloni (Fratelli d’Italia, groupe ECR). Il n’a rencontré Matteo Salvini (Lega, groupe ID) que pendant moins d’une heure, en privé.

Le projet de créer un grand groupe politique de droite radicale en fusionnant ID, ECR et les eurodéputés hongrois de la Fidesz (non-inscrits) est un échec.

Certains députés d’extrême droite ne sont membre d’aucun groupe politique (non-inscrits). Il s’agit de membres de partis ouvertement néo-fascistes. Aube dorée (Grèce) a obtenu deux députés aux élections européennes de 2019; l’un siège dorénavant en tant qu’indépendant et l’autre a été condamné à une peine d’emprisonnement en Grèce pour son rôle dans l’assassinat d’un rappeur antifasciste. Jobbik (Hongrie) a un député non-inscrit. Le L’SNS (Slovaquie) a obtenu deux sièges. Là aussi, un des députés siège en tant qu’indépendant, et l’autre a conservé son appartenance au parti.

Dresser un état des lieux de l’extrême droite en Europe suppose de rendre compte des distinctions entre les formations et mouvements qui se revendiquent de l’extrême droite, et ceux qui s’y réfèrent au promeuvent une partie de ses idées sans pour autant en assumer la filiation ou en la déguisant.

Ce site internet et tableau récapitulatif que vous pouvez télécharger ci-dessous figurent de manière synthétique l’état du rapport de force de l’extrême droite dans chaque pays de l’UE, ainsi qu’au Royaume-Uni et en Suisse. Les scores électoraux et la participation au pouvoir sont relatifs au niveau national et ne prennent pas en considération la présence de l’extrême droite aux niveaux régionaux, municipaux, etc.

La seconde partie de cet état des lieux commente succinctement, pays par pays, la nature des formations politiques liées à l’extrême droite, soulignant l’enjeu au niveau national mais aussi européen des prochaines échéances électorales.

REMARQUE: Certains partis repris sur site internet, entretenant l’ambiguïté, ne sont pas toujours considérés à l’unanimité comme des partis d’extrême droite. Plutôt que de laisser le bénéfice du doute, nous les avons sciemment repris dans cet état des lieux dès le moment où une partie de leur programme épousait les principales thématiques de l’idéologique d’extrême droite reprise ci-dessus.

Résister efficacement à l’extrême droite: un cordon sanitaire de triangles rouges

Les idées qui menacent nos libertés fondamentales dans les urnes et dans la rue, cela nous concerne tous. Nous n’avons pas toujours les moyens ou l’envie de nous engager dans de longues discussions parfois houleuses ou d’agir sur le terrain. Face aux discours faciles, haineux, racistes, sexistes ou liberticides, s’engager c’est faire preuve de vigilance et marquer sa désapprobation dès qu’elle semble nécessaire.

Le Triangle Rouge est le symbole de la résistance aux idées qui menacent nos libertés fondamentales depuis de nombreuses années. Porté sous forme d’un pin’s, il permet à chacun de rappeler discrètement que la plupart des citoyens refusent de céder aux idées haineuses, racistes, sexistes ou liberticides.

Dans les camps de concentration, le triangle rouge était la marque des prisonniers politiques, celles et ceux considérés comme des opposants au régime nazi. Aujourd’hui, le pin’s Triangle Rouge est le symbole de la résistance aux idées qui menacent nos libertés fondamentales. Le porter, c’est participer à une action citoyenne pour une société libre, démocratique et solidaire.

1. Biard B. (2019) “L’extrême droite en Europe occidentale (2004-2019)”, Courrier hebdomadaire du CRISP, n°2420-2421, 104 p.

2. Il s’agit de critères (inégalitarisme, nationalisme et radicalisme) énoncés dans la thèse de Jérôme Jamin: L’imaginaire du complot de l’extrême droite en France et aux États-Unis, parue en 2008;  et souvent réemployés par la suite, notamment dans un article « Extrême droite et extrême gauche » dans la revue Politique n°57 de 2008, d’où est extraite la définition suivante: « En tant qu’attitude qui vise à agir sur la racine (radix), sur la cause profonde du phénomène qu’on veut modifier, le radicalisme représente un type d’action ‘absolu’, une façon d’agir ‘totale’ pour donner forme à un projet politique. En tant que comportement radical visant la cause première qui anime un projet ou un obstacle (c’est-à-dire la racine élémentaire, le cœur d’une réalité ou d’un fait), le radicalisme représente un procédé ou une conduite extrême pour donner corps à un projet spécifique. Si le radicalisme peut renvoyer à des groupes radicaux dans la mouvance de l’extrême droite ou de l’extrême gauche, le radicalisme n’est pas du tout spécifique à l’extrémisme en politique. »